Septembre 2013

Eté 2013
Record d’étendue des glaces arctiques au mois de septembre

En ce 13 septembre 2013, le minimum annuel d’étendue de la banquise arctique n’a pas atteint les valeurs record du minimum du 19 septembre 2012. Cette année, la banquise arctique à son minimum couvrait encore 5,1 millions de km2 alors qu’en 2012 elle s’étendait sur seulement 3.4 millions de km2. Dans la série des années récentes particulièrement déglacées initiée en 2007, 2013 se positionne, avec 2009, comme l’année la plus englacée en septembre. De ce fait, même si la tendance moyenne à la décroissance de l’étendue des glaces de septembre depuis 1979 continue de s’affirmer, pour la première fois cette tendance se redresse légèrement : estimée à 14% (de la moyenne sur la période 1981-2000) en 2012, elle n’est plus que de 13.7% en 2013. Néanmoins, ce que l’on pourrait supposer être une reconstruction du couvert estival des glaces arctiques n’est sans doute que passager : depuis 2007, l’étendue des glaces arctiques ne s’est jamais rétablie aux niveaux observés au cours de la période antérieure, restant en deçà de la valeur la plus basse de cette période (5.6 millions de km2 enregistrée en 2005).

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Minimum d'extension de la banquise arctique estivale le 13 septembre 2013 - © Polar View - Bremen University


Tout en se caractérisant par des étendues globales similaires en fin d’été, les couverts de glace de 2009 et 2013 sont pourtant relativement contrastés. En septembre 2009, la glace s’était retirée de manière plus marquée dans l’ouest de l’Arctique, libérant en particulier l’est du plateau des Tchouktches et le sud-ouest du bassin du Canada. A la différence, en 2013, la glace était plus proche de la moyenne climatologique dans ces régions tandis que son retrait dans l’est de l’Arctique était très marqué, atteignant, voire dépassant, celui de septembre 2012. L’englacement le long des côtes orientales du Groenland a ainsi été particulièrement faible en 2013 et la route du Nord le long des mers eurasiennes (Barents, Kara et Laptev) est restée largement ouverte durant l’été. Le relatif englacement de l’ouest de l’Arctique cet été a été associé à la présence d’une glace plus compacte qu’à l’habitude dans ces secteurs. En parallèle, un couvert de glace lui aussi relativement compact s’est maintenu dans la partie septentrionale de la mer de Sibérie Orientale. Ces deux anomalies ont contribué de manière essentielle à la différence très significative d’étendue des glaces entre 2012 et 2013.

Le cas de 2013, plus que de toute autre année, met en évidence la possibilité de contrastes très marqués de la banquise d’une année sur l’autre. Dans ce registre, la différence de couvert de septembre entre les deux années consécutives 2012 et 2013 (1.72 millions de km2) constitue, avec celle enregistrée entre 1995 et 1996 (1.75 millions de km2), un record de variation interannuelle pour le minimum de fin d’été depuis le début des observations satellitaires de ce couvert. Cependant, alors que le contraste entre 1996 et 1995 peut être attribué au caractère exceptionnel de l’année 1996 qui a vu une banquise couvrant l’ensemble de l’Arctique Central y compris les mers bordières (à l’exception de la mer des Tchouktches), le contraste entre 2013 et 2012 traduit plus certainement le caractère exceptionnel de l’été 2012.

Arctic-2013-extentVarComparaison de la variation annuelle de la concentration en glaces de mer depuis 2007 - © Polar View - Bremen University


2012 fut une année particulièrement chaude mais là n’est probablement pas l’unique raison de ce désenglacement exceptionnel, aidé aussi sans doute par un effet de préconditionnement de la glace devenue de plus en plus mince et labile au cours des dernières décennies. Des études récentes suggèrent que ces contrastes interannuels du minimum de glace restent pourtant difficiles à prévoir. En comparaison de 2012, l’été 2013 fut froid, certaines régions ayant même expérimenté des températures plus basses que la moyenne climatologique. La présence de basses pressions persistant pendant l’été au centre de l’Arctique a pu renforcer l’influence des températures atmosphériques relativement basses en facilitant l’étalement de la banquise sous l’action des vents.

Les minima d’étendue de septembre semblent en effet avoir un lien étroit avec les régimes de vent prévalant durant l’été sur l’Arctique. Ces régimes sont notamment susceptibles de favoriser l’export de glace vers l’Atlantique Nord par le détroit de Fram situé entre la côte Ouest du Svalbard et la côte Est du Groenland, ou d’engendrer au centre de l’Arctique des anomalies de vents anticycloniques favorables à une contraction du couvert de glace. L’augmentation d’intensité ou de fréquence de ces régimes observée sur les années récentes pourrait aussi expliquer la tendance générale à la diminution du minimum de glace de septembre sur cette période. Les minimums de septembre les plus marqués semblent aussi être associés à une augmentation du transport d’humidité vers l’Arctique, renforçant l’effet de serre et provoquant le réchauffement de la surface, ou à une augmentation du transport de masses d’air plus chaudes en provenance des basses latitudes. Ainsi, les basses pressions qui ont dominé l’Arctique au cours de l’été 2013 ont pu faire barrière à de tels apports de chaleur. Notons cependant que tous ces liens restent à préciser, notamment leur caractère robuste qui ne pourra être établi tant que la série temporelle des observations reste limitée.

Marie-Noëlle Houssais, Novembre 2013


Pour en savoir plus :

Voir le site du Polar view center de l'Université de Bremen (Germany)
Voir le site du NSIDC (National Snow and Ice Data Center - USA)


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